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LINGANE
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20 octobre 2009

Chesterton et l'éloge du dogme

L’esprit humain est-il ou non susceptible de progrès ? C’est là une question trop rarement agité, car rien ne pourrait être plus dangereux que de fonder notre philosophie sociale sur une théorie discutable qui n’a pas été discutée.

Quand bien même nous supposerions, par goût d’argumenter, qu’il y eut dans le passé ou qu’il y aura dans l’avenir un phénomène tel que la croissance ou le perfectionnement de l’esprit humain, il n’en reste pas moins une grave objection à soulever contre la conception moderne de ce perfectionnement. Le vice de cette conception moderne du progrès intellectuel est qu’il s’agit toujours de rompre des entraves, de démolir des barrières et de rejeter des dogmes. Or, s’il existe un phénomène de développement intellectuel, il doit signifier le développement de convictions de plus en plus nettes, de dogmes de plus en plus nombreux. L’esprit humain est une machine faite pour tirer des conclusions ; si elle n’y parvient pas, c’est qu’elle est rouillée.

Quand on parle d’un homme trop intelligent pour croire, on parle d’une chose qui présente presque les caractères d’une contradiction dans les termes. C’est comme si l’on parlait d’un clou trop fort pour assujettir un tapis, ou d’un verrou trop solide pour fermer une porte. (…) On pourrait définir l’homme : un animal qui fait des dogmes. Alors qu’il empile doctrine sur doctrine et conclusion sur conclusion pour édifier un formidable système de philosophie et de religion, il devient vraiment, dans le seul sens légitime du terme , de plus en plus humain. Quand, au contraire, il rejette une à une ses doctrines avec un scepticisme raffiné, quand il refuse d’être lié par aucun système, quand il dit qu’il ne croit plus à la finalité, quand, dans sa propre imagination, il s’installe comme Dieu, observant toutes les formes de croyances sans en partager aucune, alors par ce procédé même il retourne lentement à l’état vague des animaux errants, à l’inconscience de l’herbe. Les arbres n’ont pas de dogmes. Les navets sont singulièrement larges d’esprit.

Donc je le répète, s’il doit y avoir un progrès intellectuel, ce doit être un progrès dans la construction d’une philosophie définitive de la vie. Et cette philosophie de la vie doit être vrai et les autres philosophies fausses.


G.K. Chesterton, Hérétique

chesterton4601

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Commentaires
J
Putain que c'est vrai !
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