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28 septembre 2012

Nicolas Lebourg, universitaire républicain de gauche

Au hasard des pages web, je suis tombé sur un article de Nicolas Lebourg. Il ne m'a pas fallu longtemps pour étiqueter l'individu : un national-républicain de gauche, vaguement chevènementiste, abominant le courant social-libéral de Terra Nova. Bref, un homme appréciant sans doute Brighelli, Montebourg, Todd, Marianne, voire même Guaino. Un homme dont l'idole (dixit sa page FB) est Saint-Just.

Accordons-lui cet honneur, Lebourg est bien plus cohérent dans sa grille de lecture idéologique que les tenants de la gauche blairiste.

Par contre, pour un royaliste conséquent, en l'ocurrence, je, c'est l'ennemi idéologique à abattre. Pourquoi ? Parce que le national-républicanisme a réussi, via sa propagande historique, à lier la nation et la république. Tant que ce mythe perdurera, il sera très difficile de montrer aux électeurs l'impossibilité ontologique de cette alliance. Je le redis, je le répète : la république ne peut pas admettre la frontière, ne peut pas admettre l'ethnos. En effet, par exemple, la république française se retrouve idéologiquement désarmée face à l'immigration. Oh, certes, elle dira à qui mieux-mieux qu'elle défend la citoyenneté, donc le distingo français/étrangers, mais elle ne peut pas résister au slogan "je paye mes impots, je travaille, j'ai donc le droit de voter ici". En effet, d'un point de vue républicain, la naturalisation de cette sortie de citoyen doit aller de soi. Et au bout du compte, on finira par se retrouver avec une majorité de citoyens français de jeune souche [j'ouvre ici une incise pour dénoncer l'absurdité de l'expression "français de souche" car elle ne veut RIEN dire. Ce qui est sous-entendu dans cette expression est en fait "français de vieillesouche" . En effet, un naturalisé de fraîche date peut légitimement se dire "de souche", ladite souche étant récente, voilà tout]

On me rétorquera que certains nationaux-républicains s'opposent à l'immigration de masse, à la naturalisation des clandestins et tutti quanti.

Oui, et ?

Pour quel résultat ?

Leur grande peur, via ces naturalisations et cette immigration n'est pas le changement de l'ethnos français mais la montée du FN.

Autant dire qu'ils n'ont aucun argument idéologique en défaveur de l'immigration. Au contraire même, pas mal d'entre eux rêvent, grâce à cette immigration, de voir un jour apparaitre la France aux 100 millions d'habitants, cettr Plus Grande France qui, enfin, domptera la vilaine Allemagne.[incise 2 : on reconnaîtra dans l'expression "Plus Grande France" un avatar contemporain du colonialisme, idée des lumières républicaines s'il en fut.]

Mais j'aurai l'occasion de revenir plus avant sur mon cher national-républicanisme (notamment via cette effarante interview). Je voulais au départ, ici, décortiquer légèrement l'horrible style universitaire qu'utilise le citoyen Lebourg dans cet article consacré au fascisme dans Star Wars. Le style mais aussi les erreurs (ou mensonges?) historiques d'icelui contenues.

Comme à mon habitude, les citations de l'article seront en bleu.

"La seconde trilogie a beau être ce qu’elle est(...)"

En effet, la seconde trilogie est "ce qu'elle est", merci du renseignement.

"pour faire à dessein allusion à Evola."

"pour reprendre la terminologie weberienne"

Deux hommages dès le premier paragraphe. Ça, c'est le péché mignon des universitaires, qui se sentent mal à l'aise si leur texte ne comporte pas de notes en bas de page, ou de références. [Incise : les notes de bas de page se retrouvant, hélas, conformément à l'immonde tradition des éditions de la Pléiade, en fin de volume, ce qui est une torture particulièrement vicieuse).

"[Annakin] n’a jamais été bon : dès l’épisode deux c’est de la graine de fasciste"

On notera ici la manifestation de l'inconscient national-républicain, qui assimile "bon" et "antifasciste". Même moi je pense qu'il est possible à un républicain, à un libéral, à un homme de gauche, à un communiste, voire même à un trotskyste ou un nietzchéen d'être bon. (mais un peu couillon sur les bords, certes).

"l’agir politique tel que l’avait défini Carl Schmitt : la désignation de l’Ennemi"

On se demande bien comment faisaient les hommes politiques avant Carl Schmitt...

"il est le vecteur d’une palingénésie cosmique et personnelle désignée par la dernière version DVD"

ALERTE : style universitaire imbitable en vue !

"On ne recitera pas tous les travaux de Roger Griffin désignant en l’exaltation palingénésique le cœur de l’idéologie fasciste…"

Genre on le cite tous les jours, ce Roger Griffin. Ça va les chevilles ?

Par ailleurs, il me semble, moi, que le coeur (c'est-à-dire l'élément central, celui qui a rendu cette idéologie populaire) de l'idéologie fasciste était la fusion du national et du social (1). Parce que bon... je vois mal le prolo de Dortmund, le paysan de Lombardie ou l'artisan bavarois bander pour l'exaltation palingénésique...

"Dark Vador avait jusque là agi selon la parfaite politique d’un empirisme total, provoquant l’annihilation de Alderaan, la planète de la Princesse Leïa, non mû par une quelconque haine génocidaire mais juste parce qu’il en a la possibilité."

Alors là, je m'insurge ! D'abord, "parfaite politique d'un empirisme total", ça veut peut-être faire genre, mais ça ne veut RIEN dire. Ensuite, ce n'est pas Vador qui a décidé la destruction d'Alderande (et non Alderaan, pignouf à VO!) mais le gouverneur Tarkin. Et cette destruction n'a pas été faite "juste parce qu'il en a la possibilité" mais pour anihiler tout esprit de révolte par la terreur. (Après, que ce soit efficace ou non, c'est pas le sujet).

"Jusqu’à lui sont peut-être parvenus des cris de l’Italie fasciste « travailler, haïr, se taire »"

Il semblerait effectivement que Mussolini ai employé cet horrible slogan, mais dans UN discours (du 27 octobre 1930) dont on ne connait ni le sujet ni le contexte. De là à le généraliser par l'utilisation de la formule "les cris de l'Italie fasciste", il y a une marge (mais pour un républicain de gauche, les scrupules de la vérité ne comptent pas).

Evoquant encore la destruction d'Alderande, l'auteur continue : "Le courant culturellement dominant de l’extrême droite allemande d’avant le III Reich, la Révolution Conservatrice, voit là clairement illustrer sa conception de l’usage des méthodes de la modernité pour effectuer un retour à un ordre Traditionnel (je refais référence à Evola en mettant la majuscule, on peut penser aujourd’hui à l’obsession technologique de l’Iran des mollahs pour avoir une idée)."


Perso, je vois pas trop le lien entre la destruction d'une planète et le "retour à un ordre Traditionnel" (fusse avec un T majuscule), mais bon... Je vois encore moins le rapport avec le programme nucléaire de l'Iran. Mais il est vrai que Lebourg écrit aussi là....

"Il [Vador...] détruit cette planète, il tue et massacre, parce qu’en lui résonne également le slogan que Schmitt légua aux nazis « Ennemi Total, Guerre totale, Etat total » (chaque élément engendreant le suivant). Est-ce une coïncidence si l’Empereur n’abolit le Sénat, factice mais présent depuis vingt ans, pour enfin atteindre à la totalité de l’Ordre Nouveau, qu’au moment où la planète est sacrifiée ?"

Oui alors là, désolé, cher Lebourg, mais oui c'est une coïncidence. Dans l'épisode IV, le gouverneur Tarkin explique clairement que l'empereur a décidé de dissoudre le sénat parce qu'il y avait une possibilité qu'il soutienne la rebellion. (et puis vous imaginez vous, Palpatine se dire "on a détruit une planète en 2 secondes ? Cool ! Tiens, je vais dissoudre le sénat" ? L'enchainement d'idées n'est pas logique. La dissolution du sénat était une réforme administrative visant à transférer du pouvoir du corps législatif aux haut-fonctionnaires).

Mais le passage le plus choquant est celui ou (encore à l'aide de Schmitt ! il a bon dos, ce Schmitt !!!) l'auteur attribue aux nazis le concept de guerre totale. Quand on sait quelles crottes de mouche furent les bombardements de Londres, Guernica (2) ou Coventry comparés aux holocaustes de Dresde, Hambourg, Berlin, Nuremberg, Tokyo, Hiroshima, Nagasaki ; quand on connait la différence de traitement des prisonniers de guerre entre ceux de la Wermacht et ceux de l'US Army (pour ne rien dire de l'Armée Rouge!), cette affirmation de Lebourg est une vaste blague, une atroce plaisanterie.

"C’est la « guerre totale » joyeusement hurlée par Goebbels, simplement parce que la possibilité existe et qu’elle ouvre la voie à un avancement définitif du projet totalitaire sith. Et quelle plus parfaite allégorie de l’Etat fasciste que cette armée uniquement faite de clones ?"


Là encore, on hésite : l'auteur est-il un ignare total ou un menteur sadique ? La guerre totale, notamment par l'utilisation au maximum du potentiel industriel, ne fut mise en place en Allemagne qu'après 1941, soit bien après l'URSS. Et Goebbels ne devait pas se marrer tout les jours, à savoir les formidables machines de guerre russes et américaines grignoter peu à peu les territoires occupés par l'Allemagne nazie écrasée de bombes au phosphore.

Ensuite, il faut savoir, cette guerre totale de l'empire galactique, c'est parce que "la possibilité [de la faire] existe" ou parce que [l'étoile de la mort] ouvre la voie [à l'écrasement des rebelles] ? Dans un cas, c'est gratuit, dans l'autre, c'est réfléchi. Mais bon, soyons indulgents. La cohérence, le poids du sens des mots, ça n'est pas le fort du national-républicanisme de gauche...

Enfin, permettez-moi de loler haut et fort à l'affirmation selon laquelle l'armé fasciste idéale serait composée de clones. La lecture de la plus vulgaire page wiki sur l'histoire militaire de 39-45 montre bien qu'au contraitre, l'autonomie dans l'action de l'officier, du sous-officier et même du soldat, faisait partie des principes tactiques élémentaires de la Wermacht. C'est bien plus au soldat communiste de Staline ou aux boys soumis à l'intendance de Roosevelt que devrait s'appliquer cette formule d'armée de clones.

L'auteur jette maintenant un oeil sur les Jedis. Je vous le dis tout de suite, le paragraphe suivant est pour moi imbitable.

"Héros fasciste donc Dark Vador. Mais les Jedï valent-ils mieux ? Quand ils ne chutent pas dans le monde moderne c’est, justement, au profit d’un immersion dans un naturisme radical, qu’un historien comme Pascal Ory désigne comme au centre de la pensée fasciste. Les voici prêts au sacrifice du politique, du progrès, au profit d’un idéologie totalisante du rapport de l’homme à l’Univers, obsédée par la décadence matérialiste et le caractère négatif et décadent de l’intrusion des masses dans le processus historiques ayant mis fin à l’ordre républicain."

Si vous, lecteur, avez compris ce que Lebourg voulait dire, faites-le moi savoir, merci.

 

Quant au dernier paragraphe, c'est le plus WTF ?! qui soit :

"En somme l’univers star warsien est celui d’un impossible choix entre un fascisme spiritualiste et conseilliste (les Jedï) et un matérialiste, technologique et étatiste (l’Empire). La seule solution raisonnable pour Dark Vador est dès lors l’intrusion dans le continuum spatio-temporel afin d’assassiner Kennedy. CQFD."


 

 

 

 

(1) Le facisme et le nazisme fusionnaient effectivement le national et le social, mais ils n'étaient pas les seuls. C'était aussi le cas du gaullisme, du péronisme, du travaillisme brésilien, du bonapartisme ou du baassisme.

(2) Guernica, ou l'incarnation la plus pure de l'expression "tempète dans un verre d'eau". Tout ce pataquès pour 126 morts. Lol.

PS : non, il n' a pas de photos ni de légendes drôles pour accompagner cet article. Il est déjà assez long comme ça pour que je me fade encore de recherches google image et use mon cerveau à trouver ces saillies drolatiques que vous appréciez tant.

 

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