Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
LINGANE
Publicité
LINGANE
Derniers commentaires
Archives
8 avril 2009

chronique télé, épisode VI

Casques Bleus (France 3, 7 avril)

Je ne suis pas très fan des films de Jugnot, et carrément hostile à ses dernières productions, larmoyantes et démagogiques à souhait. Et je ne vais pas parler de Casque Bleu non plus, même si c'est le film de Jugnot que je préfère. Par contre, en regardant la télé avec une attention distraite, m'est revenue une scène qui m'avait beaucoup frappé. C'était chez Arthur, aux Enfants de la télé. Autour de l'animateur, il y avait ses habituels potes de Deauville, et donc Jugnot. Tous regardaient un bêtisier : un vieil homme, marchant avec une canne, se promène avec son fils sur un chemin de campagne, le fils montre quelque chose dans un arbre. Le vieil homme lève la tête et...manque de tomber en arrière. Son fils le rattrape au dernier moment.

Retour plateau, Arthur et ses potes se marrent comme des gorets. Tous, sauf Jugnot. Arthur lui demande pourquoi. Jugnot répond que cette scène, révélant la faiblesse du vieillard, l'a émue. Il a les yeux humides.

Ce soir-là, j'avais ressenti la même chose que Jugnot, plus le dégoût de voir ces showbizeurs rire. Ce soir-là, j'ai su que Gérard Jugnot était un être humain, et un être humain sans doute malheureux de ne pouvoir cracher son dégout à la face de ses collègues de plateau, là-bas, sous les lumières crues des Enfants de la télé.

***

Aimer vivre en France (TF1, la nuit)

Tout le monde est d'accord sur ce point : le JT de Jean-Pierre Pernaud est imbuvable. Priorité à la météo, au trafic, aux faits divers, aux micro-trottoirs, sarkozysme affiché. Bien. D'accord. Tout le monde est d'accord. Moi aussi.

Mais, entre nous, est-ce vraiment pire que le journal de la 2 d'Elise Lucet ? que le journal de Canal de Bruce Toussaint (l'homme qui croit encore qu'Ariel Wizman est spirituel et original) ?

En fait, Pernaud s'est trompé de vocation. Il voulait être PPDA, il est la réincarnation de Pierre Bonte, le chantre des provinces françaises. Et quand on voit ce qu'a été la carrière de PPDA, c'est peut-être pas le mauvais choix. Passé le quart d'heure de désinformation quotidien, le JT de Pernaud devient regardable. Les mêmes gimmicks (la cloche qui sonne en début de reportage, le ton calme et serein du journaliste, le pittoresque des images), les mêmes thèmes (les recettes d'antan, les pierres d'antan, les métiers d'antan), la même schizophrénie.

De même que les hommes de la gauche chérissent les conséquences dont ils maudissent les causes, les hommes de la droite libérale, les Jean-Pierre Pernaud éternels, pleurent les conséquences (la fin des métiers d'antan, des recettes d'antan, des pierres d'antan) dont ils chérissent les causes à longueur d'annés (le libéralisme, l'innovation technologique, la vie comme un Ipod*).

Mais bon, je dois avouer que pendant une heure, en pleine nuit, la compilation des reportages du JT de Pernaud (le thème cette fois-là était consacré aux confiseries traditionnelles) n'est pas désagréable à regarder. On se dit que ça tient encore, que tout n'est pas tout à fait saccagé, mais l'on ressent aussi une gêne, comme s'il fallait vite, très vite mettre tout le patrimoine en boîte, sous vide, comme si la fabrication artisanale de la saucisse de Morteau nous chuchotait, un peu tremblante : "encore un instant, monsieur le bourreau".

*Je dis Ipod comme ça, pour faire genre, je sais vaguement ce que c'est, c'est dire si je suis bien barré pour inventer la vie qui va avec le monde libéral.

****

Les vingt ans des Guignols (Canal)

J'ai reçu un mail de lecteur suite à la parution de ma chronique n°5, s'étonnant que je n'y parle pas de l'émission consacrée aux vingt ans des Guignols de l'Info.

Et bien cher lecteur, moi c'est votre étonnement qui m'étonne. Pourquoi perdre son temps à parler d'un non-évenement ? Qui regarde encore les Guignols ? Vous souvenez-vous de la dernière fois que vous avez ri d'un de leur gag ? Laissez, lecteur, laissez Bruno Gaccio encaisser ses dizaines de milliers d'euros mensuels et faire (j'imagine) sa promo de Ségolène Royal, ses sempiternels sketchs de dirigeants PS un peu ahuris, grondés par Maître Bruno de n'être "pas assez à gauche", ses interviews au comique de répétition ou l'on sent surtout la répétition et pas trop le comique, ses éloges des djzeun's de banlieue (toujours raisonnables, c'est touchant).

Les Guignols de l'info auront au moins permis au mauvais imitateur Yves Lecoq de restaurer son château de Villiers-le-Bâcle.  Ça fera un beau petit sujet pour Jean-Pierre Pernaud.

* * *

Tour des Flandres (France 4, 5 avril)

C’est LA course de l’année pour les Flamands. Que voit-on ? Des coureurs, la plaine prospère des Flandres Occidentales, des pavés, des "monts" (côtes aux gros pourcentages), pavés eux aussi, de la boue quand il pleut, de la poussière sinon. C’était un dimanche de poussière, ce jour. Quoi encore ? Des milliers de gens sur le bord de la route. Un spectacle gratuit, peut-être le dernier grand sport qui échappe un peu à la logique totalitaire du libéralisme, du monde marchand. Les gens vont sur le bas de leur porte, ou en pleine campagne, ils attendent les coureurs en mangeant des frites ou un sandwich, discutent avec leur voisin de fortune, l’inconnu d’un jour avec qui on partagera l’amour du cyclisme. Puis les coureurs passeront, en petits pelotons si on a de la chance, comme ça le plaisir simple de les admirer dure plus longtemps.

Et si le cyclisme avait si mauvaise presse justement parce qu’il n’arrive pas à endosser tout à fait ce côté "fun" et "pompe à fric" des autres sports ? Comme si son traditionnalisme foncier n’arrivait pas, vraiment pas, à se soumettre à la logique économique ? Après tout, comment expliquer sinon la farouche sévérité avec laquelle on assimile le cyclisme au dopage, et l’indulgence toujours renouvelée avec laquelle on ne l’évoque jamais, au hasard, au foot ?

* * *

GP de Malaisie (TF1, 5 avril)

Un grand prix de formule 1, ça ressemble à une grande table remplie de victuailles, à un marché grouillant d’épices, de poissons et de charcuterie, c’est une ode à la couleur. Il règne sur les circuits, à l’heure du départ un joyeux désordre, bien loin de la frénésie froide du monde de l’entreprise, tel qu’on peut la vivre dans les immondes tours de la Défense. Non, sur les circuits, il y a de l’argent, beaucoup d’argent, de jolies filles par lui attirées, mais aussi des mécaniciens évoquant l’artisanat d’antan, des carossiers fignolant avec amour un dernier détail sur les bolides, et les pilotes, ces grands enfants qui aiment faire vroum-vroum et se dépasser l’un-l’autre.

Et puis c’est la mise en place, le circuit se vide, seuls les gladiateurs restent dans leurs machines. Vers 1880, les impressionnistes peignaient les rues de Paris pavoisées bleu-blanc-rouge, une exubérance joyeuse et bon-enfant. Pourquoi donc aucun peintre de notre temps n’a-t-il pensé à créer un tableau sur le thème du grand prix ?

Surtout que, question couleurs, ils auraient été servis par cet extraordinaire GP de Malaisie. Départ donné à 17 heures, la pluie menace, le ciel se pare d’un gris très beau, sombre et mat. Puis c’est le déluge soudain, à gros floc sur le bitume, les voitures glissent comme des patineurs, le joyeux désordre du départ se retrouve ici, encore plus fort. Il fait nuit noire, caméra embarquée, nous sommes les yeux du pilote. Devant lui, un mur d’eau et la lumière rouge clignotante de la voiture qui le précède. Des rigoles se forment, les lumières sont allumées dans les stands. La course est interrompue, mais durant les longues minutes qui suivent, la nature nous offre un ciel jaune fievreux, sur fond de crépuscule. Là encore, on manque d’un peintre. Faux suspense, pour ne pas perdre la diffusion télé, la course ne repartira pas. La nuit est tombée sur Kuala-Lumpur.

(Et (signe des temps ?) pour la deuxième fois, les petites écuries sont devant. Encore un effet de la crise économique mondiale ? Il semble loin le temps où les grosses écuries, à coup de milliards, écrasaient la saison d’un mortel ennui.)

Publicité
Publicité
Commentaires
G
Cher Lingane,<br /> <br /> Où trouve-t-on votre chronique TV VII, je cherche partout mais comme je suis une cruche en informatique je ne la trouve pas.<br /> Je suis impatiente de la lire car je vous suis chaque semaine et c'est comme une petite madeleine, on a nos habitudes en Province, voyez-vous...
Publicité